La prononciation des voyelles en chant grégorien

(Article 1 de la Méthode pratique de chant grégorien selon les principes et la notation de l’édition Vaticane, par Dom Lucien David, 1912)

Le chant grégorien n’étant, en définitive, que le perfectionnement musical du latin parlé ou déclamé, une bonne diction latine est la base nécessaire d’une bonne exécution des mélodies grégoriennes.

La bonne diction consiste : à bien prononcer les voyelles et les consonnes, qui forment les mots : à bien observer les accents,- qui donnent aux mots l’uniité et la vie ; à bien distinguer et ordonner les mots et groupes de mots qui forment les phrases. D’autre part, la lecture, la récitation et le chant des textes liturgiques ne relevant pas seulement du langage ordinaire, mais du discours plus ou moins solennel, de la déclamation, les voyelles devront y être toujours plus musicales, les consonnes plus soigneusement articulées, les accents plus marqués que dans le langage ordinaire.

En règle générale, en latin toutes les lettres se prononcent.

Les voyelles

La beauté du chant repose en grande partie sur la qualité des voyelles. Presque tout le souffle vocal doit leur être consacré, car elles seules fournissent la matière proprement musicale.

Les voyelles ayant pour mission de déterminer exactement la couleur du son. il faut donner à chacune d’elles sa nuance exacte.

  • A. Son de gravité moyenne, comme dans repas (entre pâle et patte).

Suivi de deux consonnes, il est un peu plus ouvert : évitez cependant de trop tendre les lèvres.

Dans les vocalises, ne jamais lui donner un son trop ouvert.

Ne transformer l’a ni en ê ni en ô : pétri, ou pôtri pour patri.

  • E. Se prononce plutôt ouvert : è, surtout quand il est accentué (Dèus), et quand il est suivi de deux consonnes (mendax), ou d’une seule à la fin d’un mot (autèm).

Il se prononce un peu moins ouvert — mais jamais fermé connue dans le mot français été — à la fin des mots (voce), ou encore avant l’accent (emitto).

E suivi de u reste distinct de cette voyelle (mè-us), à moins que les deux voyelles ne forment diphtongue (eu-ge), comme on le verra plus loin

  • AE, OE. Ces groupes de voyelles (liées ou non dans l’impression : oe, ae) se prononcent comme e simple, plus ou moins ouvert selon le cas : poéna (pêna). rosae (presque rosée).

Mais si ae, oe appartiennent à deux syllabes distinctes, les deux voyelles gardent chacune leur son propre : a-érem, co-egit.

  • I. Se prononce comme l’i français. — Éviter de tendre les lèvres.

Précédé ou suivi d’une autre voyelle, il ne se fond pas avec elle. Ainsi le mot latin ait se prononce comme le français : maïs, et non comme : fait ; le mot fiet comme : prière, et non comme : relief. Gràtia, pietas, periit, corruit, ont chacun trois syllabes et non deux ; cui (avec un c) en a deux et non une seule.

Précédé de qu, la voyelle i, comme on le verra, ne forme qu’une seule syllabe avec ce groupe de lettres.

Par exception i est consonne et se prononce y dans quelques mots comme eius (ou ejus), aiebat, alléluia, Iésus (e-yousse, a-yebat, etc.). Il est alors parfois écrit j. mais se prononce toujours y.

  • O. Toujours assez ouvert, comme dans : tort : jamais aussi fermé que dans : plutôt.

Un peu moins ouvert peut-être quand il termine un mot, mais éviter toujours d’avancer les lèvres, et bien desserrer les dents.

  • U. A le son ou. Former ce son dans l’arrière-bouche : avancer les lèvres le moins possible : bien écarter les maxillaires.

Précédé de q (ou parfois de g : mais non de c) et suivi d’une autre voyelle, l’u joue presque le rôle de consonne ; il se prononce rapidement et ne forme qu’une syllabe avec la voyelle qui suit : qui quoui. presque qvii, quoniam (qoouniam qvoniam), sanguis (sangouis).

  • AU. EU, formant diphtongues. On les prononce d’une seule émission de voix, mais de manière à faire surtout entendre la première voyelle (a, e) et à passer très vite sur la seconde (u=ou). Ex. : Autem : prononcez : ;àoutem (2 syllabes) ; audire : aoudire

Lorsque dans le chant plusieurs notes se trouvent sur au ou sur eu, toutes ces notes jusqu’à la dernière se chantent sur la voyelle a ou e ; la dernière note seule porte la diphtongue entière : aou, eou.

  • AM, AN. EN, etc. Une voyelle suivie d’un m ou d’un n garde toujours son timbre propre (et ouvert), comme dans les mois Français : dame, benne, fine, bonne : elle n’a jamais, pas même dans les syllabes finales, le son nasal sourd comme dans bambin, en, rien, bon, un. Ainsi, inende se prononce : inn-ténn-de, el non : hein-tein-dé : Lampas se prononce : lame-pass, et non : lan-passe ; umbra se prononce : oum-bra el non : on-bra.
  • AI, OU. UA, etc. Deux voyelles qui se suivent conservent chacune leur son propre. Font exception, comme on l’a vu : ae, œ diphtongues : i et u consonnes.

Remarques pratiques :

1° On utilisera, pour obtenir une bonne couleur des voyelles, d’abord les voyelles seules, puis les voyelles encadrées de consonnes, en épelant lentement. On reprendra un peu plus tard ces exercices avec l’accentuation et la diction normale.

Dans la récitation ou le chaut on surveillera particulièrement :

  1. Les nasales, en faisant entendre la voyelle dans toute sa pureté, comme si l’m ou l’n appartenaient à la syllabe suivante : i-ntè-nde ;
  2. La rencontre des voyelles qui doivent rester distinctes : ru-ina. puer, tu us, acti-o, pi-etas, tu-e-or, bo-um ;
  3. Les diphtongues au, eu

2 réflexions au sujet de “La prononciation des voyelles en chant grégorien”

  1. Je me suis intéressé à la prononciation du « o » récemment.
    Le livre du père Guilmard est beaucoup plus complet que ce dit ce guide. C’est même plus nuancé que ce je pensais.

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    • Exact, c’est aussi ce que je me suis dit en consultant ce recueil par Dom Lucien David. Mais je publierai aussi d’autres extraits à l’occasion qui vont beaucoup plus loin que le livre de Dom Guilmard.

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